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~ LA TERRE DE FEU D'ARGENTINE ET DU CHILI ~
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La géopolitique a ses raisons que la raison ignore : la Terre de Feu est une île coupée en deux, dans le sens vertical, par une frontière, et appartenant ainsi à l'Argentine et au Chili ; et pour y accéder, un ferry, au Chili. Nous sommes donc obligés d'immigrer quelques heures au Chili, alors que la seule ville importante, Ushuaia, est côté argentin. Une demi-heure de route, et nous voilà au poste frontière argentin, mais quelle n'est pas notre stupeur de constater qu'il y a environ une demi journée de file d'attente, … c'est trop pour nous. Il est vrai que nous sommes le 31 janvier, au milieu des grandes vacances d'été des argentins et des chiliens (c'est l'équivalent du 31 juillet en France, avec les bouchons que l'on connait). Nous optons alors pour une centaine de kilomètres de piste (très belle au milieu de la steppe de Patagonie), pour passer la frontière à un petit poste de douane et nous interrompons d'ailleurs les douaniers dans leur partie de baby-foot ! |
En moins de 10 mn, nous voilà donc au Chili, et nous pouvons accéder sans peine au ferry qui va nous emmener en Terre de Feu, en à peine 20 mn de traversée du détroit de Magellan. |
Lundi 2 février : Nous voilà en Terre de Feu, avec du beau temps et une température de 15°, ce qui est étonnant à cette latitude située à 1.200 km de l'Antarctique. Depuis les voyages de Magellan, au XVIème siècle, les explorations du Fitz Roy et de Darwin au XIXème siècle, et de nos jours encore, cette "terre de l'extrême" n'a cessé de fasciner les voyageurs intrépides. Des plaines désolées du nord aux glaciers descendant presque jusqu'à l'océan, en passant par les forêts vierges de lenga, l'archipel semble être un appel constant à explorer ses mystères. |
Ce serait dû aux feux allumés sur la côte par les indiens Yahgan que l'on doit le nom aujourd'hui célèbre de la région. L'archipel se compose d'une grande île, Isla grande de Tierra del Fuego, et de nombreuses autres plus petites, inhabitées pour la plupart. L'archipel de la Terre de Feu est séparé de la Patagonie et des Andes par le détroit de Magellan. Au Sud, le passage de Drake sépare les îles du continent Antarctique. |
A Rio Grande, la première ville que nous traversons, nous voulons faire le plein de diesel, mais une fois de plus nous nous heurtons à cette discrimination envers les étrangers : le litre de gazole est de 2,06 pesos pour les argentins, mais à 3,24 (environ 1$ USA) pesos pour les étrangers ! Mais aussi bien le gérant de la station que les pompistes ont honte de cette loi et vont jusqu'à nous serrer la main et féliciter Gwendolyn de ruer dans les brancards, et nous demande de le faire savoir. |
Toujours à Rio Grande, alors que nous surfons sur Internet dans le 4x4 (merci les Wi Fi non sécurisés !), nous sommes abordés par des argentins, propriétaires d'une importante estancia en Terre de Feu ; et nous voilà invités à passer deux jours avec cette famille dans cette ferme du bout du monde. Décidément, notre véhicule attire l'œil et la curiosité, nous offrant ainsi des opportunités uniques de rencontrer les habitants et de comprendre les pays. Mais voilà aussi pourquoi nous n'avançons pas et avons un bon mois de retard par rapport à notre planning initial ; nous pensions être à Ushuaia ce soir, mais l'invitation dans l'estancia va encore décaler ce moment. |
Après 60 km d'une des plus belles pistes que nous ayons faites, au milieu de steppes éclairées par le coucher de soleil, nous voilà à l'Estancia El Salvador, où Jorge et Cristina, et leur fils et belle-fille Adrian et Mariana, nous invitent à partager leur expérience. El Salvador, en bordure de la frontière chilienne en Terre de Feu, est une estancia "moyenne", de 25.000 hectares (50 km de long sur 5 km de large), avec un troupeau de 25.000 moutons (1 mouton à l'hectare) et 150 chevaux. Une douzaine de gauchos y travaillent en permanence, et ils sont plus de 40 au moment de l"esquila" (la tonte des moutons). |
Un peu effrayés par l'usine à touristes qu'est Ushuaia, nous voilà donc avec un immense plaisir en immersion totale dans cette propriété, où nos hôtes font tout pour nous faire découvrir cette "vraie" vie en Terre de Feu. Pendant deux jours, nous partageons ainsi la vie des gauchos, en cette période chargée de la tonte des moutons et de la vente des agneaux. La journée commence à 7h30 le matin par un petit déjeuner de "chuletas", des délicieuses côtes d'agneau de l'estancia. Le travail démarre alors, tonte des moutons, tri des agneaux qui partiront à l'abattoir, entrecoupé de pauses "maté". Nous assistons également à la "tonte des yeux" ("esquila de ojo"), qui permet ainsi aux moutons de ne pas être aveuglés par leur laine et de continuer à s'alimenter. L'estancia est une structure très organisée, avec un réfectoire et une cuisine dans laquelle un couple prépare les repas pour les gauchos et les propriétaires. La cloche sonne le passage à table, et nous avons droit, matin, midi et soir à une véritable dégustation d'agneaux prélevés sur le cheptel (côtes d'agneau, gigot, ragout, …), un régal ! L'estancia a un petit abattoir pour sa consommation personnelle, et c'est ainsi 5 agneaux par semaine qui sont préparés pour les repas des gauchos. Avant notre départ de l'estancia, un camion vient chercher 350 agneaux, clôturant ainsi notre expérience de "gaucho". Ces agneaux, vendus 90 pesos l'unité (20 €), seront dans trois heures à Ushuaia, où ils finiront dans les assiettes des nombreux touristes fréquentant les restaurants de la ville. Merci à vous, Cristina, Jorge, Mariana, et Adrian, de nous avoir permis de partager votre amour de la nature, c'est une expérience unique que nous n'oublierons jamais. |
Vendredi 6 février : Après sept mois sur le continent américain, et 35.000 km avec notre 4x4, nous voilà enfin à Ushuaia, cette ville mythique, point de départ de notre projet "Ushuaia – Alaska". La ville est bien la plus au sud du monde, mais le marketing incessant fait autour de ce superlatif risque fort de finir par nuire à ce côté "extrême". Ushuaia est la capitale de la province argentine la plus méridionale, la Terre de Feu. La ville est considérée comme étant la plus australe du monde. Elle est située à proximité du Canal Beagle. Le nom de la ville vient de la langue indigène yagan (ou yamana) : ush (au fond) et wuaia (baie ou crique). Ushuaia fut fondée en 1884 sur les bords du Canal du Beagle. Durant la plus grande partie de la première moitié du XXème siècle, la ville se développa autour d'une prison pour des criminels particulièrement dangereux. Le gouvernement argentin s'inspira de l'exemple des bagnes britanniques en Australie : S'échapper d'une prison sur une île si isolée est pratiquement impossible. Les prisonniers devinrent ainsi des colons et leurs principales activités étaient de couper du bois sur les terrains environnant la prison et de construire la ville. |
Clin d'œil à l'histoire et à la politique, les argentins revendiquent les iles Malouines (gardées par les anglais de Madame Thatcher à l'issue de la guerre des malouines en 1982) ; et en Terre de Feu, de nombreux panneaux revendiquent l'appartenance de ces iles à l'Argentine. Nous avons la chance, comme il y a 10 ans, de bénéficier d'un beau temps (nuages et soleil) avec une température de 15°. Le canal du Beagle avec les montagnes enneigées en arrière-plan nous donnent de superbes points de vue, avec une belle lumière australe. Les pique-niques et bivouacs se suivent et nous en mettent plein la vue, c'est superbe ! Comme d'autres "voyageurs", nous entrons dans le "Tierra del Fuego National Parque" après 20 h, pour ne pas payer les 50 pesos de droit d'entrée, alors que les argentins ne payent que 10 euros ; mais comme le soleil se couche à 21H30, nous en profitons largement, et y dormons en toute quiétude. Par contre, dans cette ville touristique qu'est Ushuaia, dur dur de trouver une douche ; on se réfugie dans les toilettes "handicapés" de l'aéroport, avec une bassine, pour profiter de l'eau chaude ! |
Les touristes sont très nombreux en cette période estivale (4 énormes bateaux de croisière aujourd'hui). Ushuaia étant un tournant dans notre voyage, nous nous offrons un bon restaurant afin de déguster une des spécialités, la centolla (araignée de mer). De l'autre côté du Beagle, l'île Navarino, au Chili, dont la seule ville est Puerto Williams ; cette petite ville (2.500 habitants) ne figure pas dans toute la publicité "bout du monde" d'Ushuaia, mais elle pourrait revendiquer ce titre, car plus au sud qu'Ushuaia. Mais la difficulté pour y accéder et le manque de marketing ont fait rater à Puerto Williams le titre de la ville la plus au sud de la planète. |
Nous voilà donc dans la partie chilienne de la Terre de Feu, beaucoup plus sauvage, et surtout plus proche des glaciers ; nous empruntons une piste en travaux pour nous retrouver sur le chantier du futur Parc National du Lago Fagnano. Et là, c'est magique, nous nous retrouvons au début de cet immense lac glaciaire, aux eaux d'un bleu-vert laiteux de toute beauté ; les moraines venant des glaciers donnent ainsi cette superbe couleur de l'eau, le tout dans un environnement époustouflant de montagnes enneigées et de glaciers. |
Nous ne regrettons pas, loin de là, d'y être allés malgré l'interdiction d'emprunter cette piste en travaux. Nous réalisons à quel point nous sommes dans un "congélateur à ciel ouvert" ; le fait d'être dans cet environnement de glaciers fait chuter la température à 1°, et nous sommes en plein été. |
Mardi 11 février : Après un bivouac glacial au bord du Lago Blanco, avec un très fort vent, nous reprenons la piste jusqu'à Porvenir, où nous embarquons sur un ferry pour quitter la Terre de Feu et rejoindre le continent à Punta Arenas ; la mer est forte, çà déménage, et Gwendolyn passera les deux heures de traversée allongée dans le 4x4, mais ne sera pas malade. |
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